Extinction de Masse : Vers Un Monde Sans Diversité Animale

L'extinction des espèces est un phénomène naturel qui a toujours existé, l’étude des fossiles montrent qu'il y a eu cinq périodes de l'histoire où un nombre inhabituellement élevé d'extinctions s'est produit dans ce que l'on appelle des extinctions de masse, mais ce qui rend la situation actuelle alarmante, c'est la vitesse à laquelle les espèces disparaissent. Depuis l’ère industrielle, les populations animales ont chuté de manière spectaculaire, et les scientifiques parlent désormais de la sixième extinction de masse. A la veille de la 16e Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique (COP16) et alors que la fenêtre pour agir se referme rapidement, jetons un œil a la situation.

Selon le WWF Living Planet Report 2024, entre 1970 et 2024, les populations d’animaux vertébrés sauvages (mammifères, oiseaux, poissons, amphibiens et reptiles) ont chuté de 73 % en moyenne. Les zones les plus touchées sont les terres tropicales et subtropicales, notamment en Amérique latine et aux Caraïbes où la déforestation, le changement climatique et le braconnage continuent de décimer la faune sauvage.

Des espèces emblématiques, telles que les éléphants, les tigres et les grands singes, malgré les protections mises en place depuis des années sont au bord de l'extinction dans de nombreuses régions. Les tigres, dont la population mondiale est estimée à seulement 3 900 individus, ont perdu plus de 90 % de leur habitat historique. Quant aux grands singes, l'ensemble de leurs espèces sont aujourd'hui en danger d'extinction.

Dans la dernière édition de la Liste rouge mondiale (version 2024.1), sur les 163 040 espèces étudiées, 45 321 sont classées menacées soit plus de 27%. Parmi ces espèces, 41% des amphibiens, 12% des oiseaux et 26% des mammifères sont menacés d’extinction au niveau mondial. C’est également le cas pour 37% des requins et raies, 36% des coraux constructeurs de récifs et 34% des conifères.

Un État des Lieux Alarmant
Les Causes de la Diminution des Populations Animales

Selon un rapport de l’IPBES repris part l’UNEP, environ 1 million d'espèces animales et végétales sont aujourd'hui menacées d’extinction ou en voie de l’être au cours des prochaines décennies, ce qui n’a jamais eu lieu auparavant dans l’histoire de l’humanité. Une autre étude, publiée dans Biological Reviews et réalisée par une équipe de recherche internationale, indique que 7,5 à 13 % des espèces animales et végétales auraient disparues dans le monde depuis l’an 1500.

Les océans ne sont pas épargnés, avec des populations de poissons, requins et autres espèces marines qui subissent une forte pression due à la surpêche, la pollution et au réchauffement climatique​. Des chercheurs ont publié dans la revue Nature Climate Change une étude sur l'avenir de la vie marine. Ils ont étudié près de 25.000 espèces, vivant dans les 100 premiers mètres des océans et les résultats sont alarmants. Dans le cas où l'on dépasserait les 3 °C de réchauffement, 87 % de la vie des océans disparaîtrait d'ici la fin du siècle. Mais si la limitation à moins de 2 °C est atteinte, alors ce risque d'extinction diminuera de 98 %.

Les forêts qui abritent 60.000 espèces d'arbres, 80% des espèces d'amphibiens, 75% des espèces d'oiseaux et 68% des espèces de mammifères de la planète, disparaissent à un rythme alarmant. On estime que 10 millions d'hectares de forêts sont perdus chaque année, entraînant la destruction des habitats de nombreuses espèces. La conversion des terres pour l'agriculture, notamment pour l'huile de palme et le soja, est l'une des principales causes de cette déforestation. On estime à plus de 420 millions d'hectares la perte forestière mondiale enregistrée depuis 1990 du fait de la déforestation, autrement dit de l'affectation de terrains forestiers à d'autres utilisations, notamment l'agriculture.

Les Grands Chiffres sur l'Extinction

La diminution rapide des populations animales est principalement causée par l'activité humaine. La destruction des habitats est le facteur dominant, avec l'agriculture industrielle, l'exploitation forestière, l'urbanisation et la construction d'infrastructures qui perturbent les écosystèmes naturels. La pollution, sous forme de produits chimiques, plastiques et autres substances toxiques, affecte également gravement les populations animales, notamment dans les écosystèmes marins. Selon l’OCDE, chaque année, l’humanité produit plus de 350 millions de tonnes de déchets plastiques : alors que 19 % sont incinérés, près de 50 % finissent en décharge, 22 % sont abandonnés et seulement 9 % sont effectivement recyclés.

Le changement climatique est une autre cause majeure, affectant la répartition des espèces et perturbant les écosystèmes. Le réchauffement des températures, déjà estimé +1,5 degré Celsius en 2024, pousse certaines espèces vers des altitudes plus élevées ou des latitudes plus froides, mais elles ne trouvent pas toujours les conditions nécessaires à leur survie. Par exemple, l'ours polaire est menacé par la fonte des glaces arctiques, réduisant son habitat et son accès à la nourriture. Il est probable, selon certaines études, que la quasi totalités des populations d’ours polaires s’effondrent d’ici 2100.

Le braconnage et la chasse illégale continuent également de décimer des populations animales, en particulier les espèces prisées pour leurs peaux, leurs cornes ou leurs os, comme les rhinocéros et les éléphants. Malgré les efforts de conservation, le commerce illégal d'espèces sauvages est un marché lucratif qui exacerbe le déclin de ces espèces. Selon Xavier Morvan, directeur régional à l’OFB, “Il y avait à peu près 1 million d'éléphants en 1975, il en reste actuellement un peu plus de 400 000… Actuellement, c'est un éléphant qui est tué en Afrique toutes les demi-heures”.

La disparition des espèces n'est pas seulement une tragédie environnementale, elle a aussi des répercussions profondes sur le fonctionnement des écosystèmes et la survie humaine. Les animaux jouent des rôles cruciaux dans les chaînes alimentaires, la pollinisation des cultures et la régulation des écosystèmes. Par exemple, la disparition des pollinisateurs tels que les abeilles, signifie que de nombreuses espèces de plantes pourraient décliner ou même disparaître en entraînant avec elles les organismes qui en dépendent.

La diminution du nombre et de la diversité des pollinisateurs a un impact sur nos écosystèmes et notre biodiversité, mais également sur la sécurité alimentaire. En effet, ces diminutions pourraient entraîner des pertes dans le rendement agricole et accroitre les pénuries alimentaires. Dans l’Union Européenne, environ 84 % des espèces cultivées et 78 % des espèces de fleurs sauvages dépendent, au moins en partie, de la pollinisation animale. Près de 15 milliards d’euros de la production agricole annuelle de l’Union sont directement attribués aux insectes pollinisateurs.

La dégradation des écosystèmes, en particulier, les forets tropicales, contribue également à la propagation des maladies. Lorsque les hommes empiètent sur l’habitat naturel des animaux porteurs de maladies zoonotiques (comme les chauves-souris et les rongeurs) et entrent en contact plus étroit avec eux, le risque de transmission de maladies augmente et entraine des épidémies comme le virus Ebola, le paludisme ou la variole du singe. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), environ 60 % des maladies infectieuses émergentes humaines sont d'origine animale, soulignant l’importance de préserver les écosystèmes pour limiter l'émergence de nouvelles pandémie.

Les Conséquences pour l’humanité
Les Solutions pour Stopper l'Extinction

Pour stopper la perte de biodiversité, des efforts concertés sont nécessaires à l'échelle mondiale. L'une des solutions les plus prometteuses est la création et l'expansion des zones protégées. Actuellement, environ 16 % des ecosystemes terrestres et 7 % des océans sont protégés, mais les experts estiment qu'au moins 30 % des écosystèmes mondiaux doivent être préservés d'ici 2030 pour éviter un effondrement écologique .

La reconstitution des écosystèmes dégradés est également essentiel. La reforestation et la régénération des habitats naturels permettent de redonner vie à des zones autrefois dévastées. De plus, la réduction de la consommation humaine, notamment à travers une alimentation plus durable et moins dépendante de l'agriculture intensive, peut réduire la pression sur les écosystèmes.

La lutte contre le commerce illégal d'espèces sauvages et le renforcement des législations sur la protection de la faune sont également des priorités. L'augmentation des financements pour les efforts de conservation, ainsi que l'éducation des populations locales, sont des leviers importants pour garantir la survie des espèces menacées.